mardi 6 novembre 2012

Ce que la morale réprouve...

Glaive vengeur moraliste - enfance de la morale et de Dieu - mise en oeuvre de ses préceptes par La Fontaine - la morale est un serpent - l'homosexualité et la morale - prix Nobel de la morale - conclusion moralisatrice.

C’est bien connu, dans ce monde dépravé où ne semble survivre que la vermine, la morale s’érige fière et grande comme le dernier rempart face à l’infamie. C’est elle-même qui faisait s'abattre récemment, le glaive vengeur de mon camarade d'écriture sur ce sagouin de M. Arnaut. On pouvait donc lire que si le monde partait en vrille, que les marchés financiers pouvaient à leur gré maugréer, fluctuer, spéculer, c’était bien normal puisque c’était dans l’air du temps et qu’on ne résiste guerre à son époque. Mais que M.Arnaut, couard parmi les couards, puisse ainsi s’enfuir en exil vers des terres fiscalement plus hospitalières, afin d'économiser la bagatelle de quelques millions dont l’état français aurait bien besoin, c’était trop d’un point de vue moral. Il était ainsi justifié d’insulter sa mère, son père et même de lui cracher à la gueule si tant est qu’il sorte de temps à autre de sa limousine afin de profiter de l’air pur flottant sur Neuilly.

A partir de là, il apparait important de définir cette morale accusatrice et justicière, à laquelle on déplore que le peuple n’ait plus guerre recours. La morale existe depuis que Dieu est tout petit. Tous deux ont d’ailleurs grandi ensemble mais ne sont pas de la même lignée. La première est une vertu issue d'une réflexion sociologique, politique voire philosophique là où l’autre s’impose comme sentinelle sempiternelle sous différentes formes suivant qu’Il survole l’Asie, l’Egypte, la Grèce antique ou le Poitou. En grandissant, l’un comme l’autre ont toutefois suivi la même éducation faite de préceptes fondamentaux plus ou moins flous (le Bien, le Mal, la justice, le rapport à autrui) qui seront ensuite vaguement expliqués aux consommateurs que sont les Hommes, ces humbles mortels. A leur tour, ceux-ci l’interprèteront tant bien que mal selon qu’ils sont catholiques, protestants, bouddhistes, musulmans ou poitevins donc. Enfin, s'ils sont préchés à l'oral, tous deux sont prescrits par écrit et c’est là que ça se corse.


Il est en effet intéressant de souligner que la morale a fait la gloire de certains écrivains et philosophes notoires. On peut par exemple penser à La Fontaine, moraliste royal du XVème siècle, et à ses Fables. Le beau Jean avait le don de toujours trouver le bon mot et la rime juste au point qu’il est, aujourd’hui encore, adulé et enseigné comme il se doit à nos chers petiots comme une référence de la noblesse de cette langue dont on a pas fini d’explorer la finesse. La Fontaine était un homme courageux qui n’hésitait pas, sous couvert de métaphores animales, à critiquer la société, la royauté qui le nourrissait et à culbuter des bourgeoises à coup de morales assassines et de buttoir quand il en avait l’occasion. Ce qu’on oublie un peu trop souvent de soulever, c’est que Jeannot avait ouvertement pillé les Métamorphoses de ce bon Ovide qui faisait, déjà à l’époque, de très vieux os. En bon moraliste, La Fontaine mangeait donc de plusieurs pains, à brosser l'éloge de son bon roi et des lettres modernes par devant quand il critiquait à tout va et pillait outrageusement son style et ses idées aux anciens par derrière, encu... encourageant ainsi les comportements les plus vils.    
Que pouvons-nous déduire de cet exemple peu glorieux ? La morale est vive et glissante comme le serpent. Elle n’a aucune limite précise en cela qu’elle est un concept purement individuel et abstrait. Le problème étant qu’elle est appliquée à la fois de manière objective et universelle sans qu’aucune définition préalable ne lui soit nécessaire. Elle s’appuie sur des valeurs qui varient d’un individu à l’autre en fonction de la culture, de la personnalité et de l’éducation qu'il aura reçue. La morale, c’est un petit peu les règles du jeu que personne n’a jamais lues, qu’on aurait perdues dans un coin sombre et poussiéreux et dont on change une virgule ou un paragraphe selon qu’on est dans la panade ou face à un merdeux. Chacun à la sienne et c’est très bien comme ça.

La morale n’est qu’une illusion. Elle est contestable et irréfutable à la fois puisque subjective. Elle est sournoise et glissante donc, et elle a su évoluer au fil du temps et s’adapter aux mœurs des différentes époques qu’elle a traversées. Elle se contredit en permanence mais ça ne semble gêner personne. Tenez, au temps de la Grèce antique par exemple, il était entendu et reconnu que des personnes du même sexe puissent avoir des rapports sexuels (des hommes principalement). On considérait même cela comme l’expression d’une virilité affirmée et d’une franche camaraderie. Or, quelques générations plus tard, on nous dit qu’il est mauvais d’aimer une personne du même sexe et que d’un point de vue moral, il est même mieux d’en lyncher publiquement quelques uns qu’on aurait pris la main dans le sac, ou au paquet pour ainsi dire. La morale ne s'arrête pas en si bon chemin puisqu'après quelques rebondissements, il est à nouveau bien de laisser des personnes s’aimer librement. Il sera d’autant plus vertueux de l’approuver lorsqu’on ne pratique pas l’homosexualité: on n’en sortira que plus grand de faire preuve d’un tel sens moral. En revanche, autoriser les mêmes droits aux hétérosexuels et aux homosexuels n'est pas encore à l'ordre du jour...faut pas pousser.

La suite est un peu plus sombre encore. Du temps de la 2ndeGuerre, la morale a longtemps joué à cache-cache . Elle passait ainsi d’un camp à l’autre, virevoltante, séduisant les faibles comme les plus forts, fricotant avec l’ennemi comme avec l’ami, causant du tort, de la torture et des morts. La morale est une catin sans foi ni cœur. C’est l’argument de fin de discours, de tous ceux qui ne parviennent pas à convaincre mais le veulent à tout prix. Elle est insidieuse, trompeuse et elle est désormais utilisée à tout va. On en fait des prix convoités de tous, dont la récompense n’est pas que spirituelle et s’accompagne bien souvent d'un bon gros chèque. Le prix Nobel de la Paix en est un exemple parfait. Sans parler de celui qui fut attribué à notre Union Européenne il y a quelques jours, il suffit de mentionner celui de M. Obama. Celui-ci fut honoré en dépit du fait qu’il ait maintenu une prison, avec vue sur mer certes, mais qui ne répond à aucune loi, ou qu’il envoie régulièrement des drones tuer quelques pakistanais sous prétexte qu’ils pourraient représenter une menace terroriste. Inutile de mentionner le fait que la précision chirurgicale de ces drones n’est pas parfaite et que certains enfants ont également fait les frais de la guerre contre le terrorisme, pour le bien de l’Humanité, afin que la morale et le peuple puissent dormir sur leurs deux oreilles. M. Arnaut n’a lui tué personne à ma connaissance.

Beaucoup de choses ont été dites ou faites en s'appuyant sur la béquille fallacieuse qu'est la morale. Pour autant, rien dans notre société et notre histoire ne semble répondre à des critères moraux fixes ou universels. Cracher à la gueule du premier venu sans d’autres argument que ceux que la morale réprouve me semble inconsidéré et aussi peu honnête que les raisons qui animent le départ de M. Arnaut pour la Belgique. Dans un monde noyé dans la mélasse putassière de nos égaux surdimensionnés, sous les vérités et les valeurs de tout un chacun, il me semble qu’il serait bon de faire preuve d’un peu de recul. C’est en tout cas ce que la morale voudrait…

Deux astronomes grecs s'échangent leurs instruments

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